Les troubles traités par l’orthoptie
Certaines perturbations de la vision binoculaire ont de réelles répercussions sur le confort visuel et même sur la vie quotidienne, voici donc quelques exemples fréquemment retrouvés.
Quels sont les troubles/ pathologies diagnostiquées lors du bilan orthoptique ?
Points clefs : L’orthoptiste étudie la qualité de la vision binoculaire pour comprendre la survenue de certains symptômes. La vision binoculaire est la vision simultanée des deux yeux pour permettre de voir le relief et d’élargir notre champ de vision.
La vision binoculaire : le cheval
de bataille de l’orthoptiste
- Que chacun des deux yeux donnent une image nette et quel que soit la distance : l’œil est un véritable appareil photo, plus l’image est près, plus il fait le « focus » : c’est l’accommodation.
- Que ces deux images de l’œil droit et de l’œil gauche se fusionnent et permettent alors de donner les notions de distance, de reliefs. Pour cela :
- Les deux yeux doivent se diriger dans la même direction quelle que soit la distance. Si la cible que l’on regarde est près, les yeux convergent vers elle : on louche, mais quand la cible s’éloigne, nos yeux divergent. Nous pouvons aussi regarder en haut, sur les côtés, balayer de gauche à droite pour la lecture…etc. Ce sont nos muscles oculaires qui permettent ceci (6 par œil)
- Le cerveau doit être capable de « verrouiller » les deux images ensemble. Il ne doit pas, par exemple, oublier une des deux images pour n’utiliser que l’autre, par exemple.
Ainsi, quelles sont les troubles, perturbations de ces paramètres, et donc de la vision binoculaire, que l’on peut retrouver au bilan orthoptique ?
Insuffisance de convergence
Lorsque l’on regarde de près, nous louchons, nos yeux « convergent » vers ce que l’on est en train de regarder. Comme son nom l’indique alors, une insuffisance de convergence, c’est simplement lorsque l’on a du mal à amener nos yeux dans cette position de convergence. Ceci est souvent en lien avec un trouble oculomoteur : des muscles oculaires paresseux. Un patient qui présente une insuffisance de convergence, étant donné qu’il a des muscles « moins costauds » va forcer beaucoup plus, et les symptômes suivants peuvent apparaître :
- Maux de tête
- Fatigue visuelle
- Sensation de loucher, de forcer
- Photophobie (gène à la lumière)
- Difficultés pour passer de la vision de loin à la vision de près
- Sensation d’instabilité
- Vision double (les deux images se dédoublent horizontalement parfois)
La rééducation orthoptique reste alors la meilleure option : on « rééquilibre », on « remuscle » et on réapprend au cerveau à se servir des deux images correctement, sans que le patient n’ait à forcer, pour qu’il ne soit plus gêné.
Insuffisance de divergence, excès de convergence
C’est l’inverse de l’insuffisance de convergence : ici, les yeux ont du mal à aller en divergence, soit parce que les muscles qui sont responsables de la divergence (donc « qui tirent les yeux vers l’extérieur ») ne sont pas assez forts, soit parce que les muscles qui tirent les yeux vers l’intérieur sont trop toniques. Mais le résultat est le même que pour l’insuffisance de convergence, le patient force pour garder ses yeux dans la même position quelque soit la distance, et, donc, des symptômes apparaissent :
- Maux de tête
- Fatigue visuelle
- Sensation de loucher, de forcer
- Photophobie (gène à la lumière)
- Difficultés pour passer de la vision de loin à la vision de près
- Sensation d’instabilité
- Vision double (les deux images se dédoublent horizontalement parfois)
De la rééducation orthoptique est alors proposée pour rééquilibrer les forces musculaires, pour remuscler les muscles permettant la divergence (yeux vers l’extérieur) et détendre au contraire les muscles responsables de la convergence (qui permettent de loucher). Il faut alors réapprendre au cerveau à se servir des deux images correctement, sans que le patient n’ait à forcer, pour qu’il ne soit plus gêné.
Strabismes
Normalement, les deux yeux envoient la même image au cerveau, ce qui rend possible la vision du relief. Lors d’un strabisme, un œil est dévié (soit vers l’intérieur pour les strabismes convergents, soit vers l’extérieur pour les strabismes divergents) donc les deux images envoyées au cerveau sont différentes, et, la vision des reliefs devient alors impossible.
En fonction de l’âge d’apparition du strabisme, la conduite à tenir est différente.
- Chez le bébé, l’enfant, la priorité est de garantir une vision nette et identique tant sur l’œil non dévié que sur l’œil dévie. En effet, le cerveau ignore l’image de l’œil non aligné et n’interprète que l’image de l’autre œil, celui qui est centré, celui qui voit le plus net : l’acuité visuelle peut chuter sur l’œil dévié. L’orthoptiste peut donc être amené à prescrire une occlusion (un cache œil) sur « l’œil fort » pour « l’obliger à travailler ». C’est ce que l’on nomme l’amblyopie « strabique ».
- Les strabismes acquis plus tardivement entraînent souvent chez l’adulte une vision double : le cerveau reçoit deux images différentes et il a du mal à en « oublier une ». L’orthoptiste doit alors trouver une solution pour que le patient ne voit plus double : de la rééducation, un prisme, ou demande un avis chirurgical.
Paralysies oculomotrices
Les muscles oculomoteurs, au nombre de 6 par œil, permettent de mobiliser les yeux et de les diriger vers ce que l’on regarde. Ces muscles oculomoteurs sont commandés grâce à des circuits compliqués, via les nerfs oculomoteurs (nerfs crâniens III, IV et VI), qui permettent de diriger et de coordonner les actions des muscles oculaires. Le terme paralysie oculomotrice désigne alors la diminution de la force d’un muscle, ce qui se traduit par une réduction du mouvement de l’œil dans le sens correspondant au muscle paralysé. Le déficit partiel du mouvement est appelé parésie, tandis que si le déficit est total, on parle de paralysie.
L’orthoptiste est chargé de trouver le(s) muscle(s) oculomoteur(s) impliqué(s), assure le suivi, rééduque s’il y a nécessité de rééduquer, et prisme si c’est indiqué. Il peut aussi demander un avis chirurgical.
L’amblyopie
La vision se développe dès la naissance. Si le cerveau ne reçoit pas deux images identiques, parce qu’un œil est dévié dans le cadre d’un strabisme, ou, parce qu’un œil envoie une image plus floue, car il est plus hypermétrope, plus myope ou plus astigmate que l’autre, alors il laisse de côté l’image plus floue ou provenant de l’œil dévié : ainsi il ne se « développe » pas correctement : l’œil y voit moins bien, c’est l’amblyopie.
Il faut donc apprendre au cerveau visuel à interpréter aussi cette image plus floue, mais ce n’est possible qu’entre 0 et 6 ans, pendant la période dite de plasticité cérébrale, lorsque les remaniements sont encore possibles : il faut donc agir vite.
Le traitement début alors par la cause de l’amblyopie : lunettes. Ensuite, l’orthoptiste prescrit, la plupart du temps, une occlusion : autrement dit, on cache l’œil le plus fort pour stimuler l’œil le plus faible et le forcer à travailler. Les lunettes prescrites doivent impérativement être bien portées.
Donc, le défi numéro un est la découverte de l’amblyopie à temps, puisque l’enfant ne se plaint pas qu’il ne voit pas (l’autre œil compense), c’est trop facile de passer à côté. C’est pourquoi un dépistage chez un orthoptiste est fortement conseillé à 3 ans (il faudrait même le rendre obligatoire, à mon sens).